MONITORING DES INTENTIONS DE VOTE SUR LES 10 PREMIERS JOURS DE CAMPAGNE ÉLECTORALE EN RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO
MONITORING DES INTENTIONS DE VOTE SUR LES 10 PREMIERS JOURS DE CAMPAGNE ÉLECTORALE EN RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO.
Sur les 26 candidats officiellement engagés dans la course présidentielle, 8 se sont nettement démarqués dans un activisme de campagne engagé. La présente évaluation a suivi les différents candidats dans leur capacité de mobilisation, leur message de campagne et les écueils observés sur leur parcours de tournée de mobilisation.
Il se dégage que deux principaux candidats occupent le sommet des poids lourds de la campagne. Moïse Katumbi Chapwe, le candidat du parti Ensemble pour la République dont la campagne est émaillée de plusieurs incidents provoqués par le pouvoir ; et Félix Tshisekedi, président sortant dont la campagne mal partie est entrain de se stabiliser.
⏺ Moïse Katumbi Chapwe : Candidat redoutable et insubmersible, il tient une campagne électorale fulgurante avec ses propres moyens. Disposant d’une flotte aérienne propre et des ressources suffisantes pour coordonner ses équipes confortablement implantées dans tout le pays. Moïse Katumbi est un candidat longtemps préparé à l’élection présidentielle en République Démocratique du Congo à travers son passé politique et sportif ainsi que ses multiples actions caritatives qui ont ciblé des catégories vulnérables de la société congolaise (hôpitaux, déplacés de guerre, groupes sportifs et autres victimes des catastrophes. Le candidat est aussi un manager respecté bénéficiant d’un réseau médiatique très solide. Ses tournées de campagne à succès ont immensément drainé des foules inattendues.
⏺ Félix Tshisekedi Tshilombo : Président de la République en fonction, il jouit d’un créneau de partis politiques membres de la majorité présidentielle (Union Sacrée) animés par des leaders connus dans les différentes provinces et communautés du pays. Tshisekedi a l’avantage de disposer d’immenses ressources financières et une logistique de campagne propre. Certains de ses soutiens n’avaient pas obtenu à temps tous les moyens de campagne. Ce qui a fait subir au candidat un début de campagne difficile dans le Kongo - Central et le Maniema notamment. Tshisekedi fait aussi face à son bilan quinquennal peu reluisant sur le terrain. S’appuyant sur ses quelques projets phares tels que les 145 territoires, la gratuité de l’enseignement et de la maternité, le président a également accusé une certaine fatigue inhérente aux lourdes charges d’Etat mêlées aux priorités de campagne électorale.
a. Pourquoi Félix Tshisekedi perdra face à Moïse Katumbi Chapwe ?
Le président de la République a multiplié des attitudes et agissements qui ont négativement impacté sa popularité politique :
- La confiscation des provinces au profit de ses proches sans tenir compte des attentes des populations locales. Le Chef de l’Etat a anéanti les Assemblées provinciales et érigé les gouverneurs en des petits monarques protégés même dans leur mauvaise gouvernance ;
- La mégestion caractérisée des provinces ;
- Les détournements des deniers publics régulièrement récompensés par le Chef de l’Etat en personne. La plupart de ses collaborateurs accusés ou condamnés ont été relâchés et ou remis en fonction ;
- L’infantilisation de la justice qui est instrumentalisée à souhait. La justice est injustement appliquée pour écraser l’opposition ;
- Plusieurs promesses non réalisées ;
- Le tribalisme institutionnalisé ;
- Le discours de Mbuji-Mayi.
b. Pourquoi Moïse Katumbi sera en avance sur Tshisekedi
- L’opposant a été martyrisé par les deux régimes successifs de Joseph Kabila Kabange et de Félix Tshisekedi ;
- Son leadership sportif à travers son club le Tout-Puissant Mazembe (plusieurs fois champion d’Afrique et de la RDC) ;
- Gouverneur remarquable de la riche province du Katanga. Il fut la première autorité à conquérir efficacement les droits de l’Etat dans l’exploitation des minerais de la province ,
- Il dispose de plusieurs actions visibles sur l’ensemble du pays.
I. CAPACITÉS DE MOBILISATION
1. Fayulu Madidi : 32%
2. Katumbi Chapwe : 78%
3. Mukwege Mukengere : 21%
4. Mutamba Tungunga : 7%
5. Muzito Mfumu Mpa : 17%
6. Ngalasi Kurusini : 11%
7. Sesanga Hipungu : 26%
8. Tshisekedi Tshilombo : 49%
II. CAPACITÉ LOGISTIQUE DE CAMPAGNE
1. Fayulu Madidi : 45%
2. Katumbi Chapwe : 84%
3. Mukwege Mukengere : 28%
4. Mutamba Tungunga : 5%
5. Muzito Mfumu Mpa : 9%
6. Ngalasi Kurusini : 4%
7. Sesanga Hipungu : 17%
8. Tshisekedi Tshilombo : 65%
III. VICTIMES D’INCIDENTS DE CAMPAGNE
1. Fayulu Madidi : 2% (Rarement victime)
2. Katumbi Chapwe : 92% (Régulièrement victime avec perte en vies humaines et blessés parmi ses collaborateurs. Avions interdits d’arriver en RDC et collaborateurs toujours en prison en dépit de la campagne. Critique également pour les origines de son épouse)
3. Mukwege Mukengere : 7% (Meeting interdit à Bukavu avant d’être autorisé quelques jours après).
4. Mutamba Tungunga : 7% (Plainte suite à la réquisition par d’autres candidats de l’essentiel des aéronefs disponibles au pays. Programme de campagne bouleversé. Bloqué à Inongo faute d’avion).
5. Muzito Mfumu Mpa : 4% (Victime de critiques sur les médias. Accusé d’être de mèche avec le pouvoir)
6. Ngalasi Kurusini : 4% (Critiqué pour son programme jugé philosophique et irréaliste)
7. Sesanga Hipungu : 26% (Victimes d’insultes régulières sur les médias de la part des proches du pouvoir)
8. Tshisekedi Tshilombo : 22% (Victime de critiques pour l’occupation systématique de la Rtnc par rapport aux autres candidats. Critiqué également d’user des fonds du Trésor pour alimenter sa campagne).
IV. ADHÉSION POPULAIRE
1. Fayulu Madidi : 32%
2. Katumbi Chapwe : 69%
3. Mukwege Mukengere : 35%
4. Mutamba Tungunga : 3%
5. Muzito Mfumu Mpa : 10,5%
6. Ngalasi Kurusini : 8%
7. Sesanga Hipungu : 21%
8. Tshisekedi Tshilombo : 35%
V. SOUPÇONS DE CORRUPTION DE CERTAINS CANDIDATS
1. Fayulu Madidi : Ses critiques contre ses camarades de l’opposition font douter de son intégrité dans certains milieux ;
2. Katumbi Chapwe : Le pouvoir l’accuse d’être au service des occidentaux ;
3. Mukwege Mukengere : Accusé de chercher à promouvoir l’homosexualité ;
4. Mutamba Tungunga : Soupçonné de bénéficier du financement de la CENI à travers le Questeur de l’institution qui est membre de sa plateforme politique ;
5. Muzito Mfumu Mpa : Plusieurs milieux politiques et sociaux soupçonne une accointance accentuée avec le Président Tshisekedi. Ses dernières prises de position étayent l’argumentaire ;
6. Ngalasi Kurusini : En dépit de son réseau d’églises opérationnelles dans le pays, il est soupçonné de jouir d’un financement du pouvoir ;
7. Sesanga Hipungu : Connu pour ses positions intelligibles, il est soupçonné d’être de connivence avec le Candidat Katumbi ;
8. Tshisekedi Tshilombo : Il est accusé de bénéficier des fonds de l’Etat au détriment des agents et fonctionnaires de l’Etat.
VI. ALLIANCES ÉLECTORALES
Trois blocs se dessinent :
1. Union Sacrée (La majorité présidentielle) qui soutient Félix Tshisekedi. Ce bloc regroupe plus de 300 partis politiques actifs dans toutes les institutions du pays. On y retrouve essentiellement les plus hautes autorités congolaises parmi lesquelles Christophe Mboso Nkodia Pwanga, président de l’Assemblée nationale ; Monsieur Modeste Bahati Lukwebo, président du Sénat ; Monsieur Sama Lukonde Kyenge, premier ministre etc.
2. Congo Ya Makasi (Opposition) qui soutient Moïse Katumbi Chapwe. Il réunit une cinquantaine de partis politiques, mouvements citoyens et Ongs locales. Quatre leaders d’envergure nationale ont décidé de soutenir le candidat Katumbi : Augustin Matata Ponyo, ancien premier ministre très apprécié pour les ouvrages réalisés à travers la RDC et pour la stabilité de la monnaie. Il s’est désisté le 20 novembre 2023 en faveur de Moïse Katumbi Chapwe ; Seth Kikuni Masudi, candidat à l’élection présidentielle a également rejoint le candidat numéro 3 avant que Jean-Claude Vuemba, président du Mpcr et grand leader du Kongo-Central ne se manifeste derrière le même candidat. À l’étape de Kisangani, l’ancien président de la Commission Électorale Nationale Indépendante (Ceni), Corneille Nangaa Yobeluo, actuellement en exil, a déclaré son soutien à Moïse Katumbi. D’autres annonces de soutien pourraient se formaliser avant la fin de la campagne électorale.
3. Lamuka (Opposition) qui soutient Martin Fayulu Madidi. Des rumeurs non encore confirmées affirment que le prix Nobel de la Paix Denis Mukwege serait en pourparlers avancés avec le candidat Martin Fayulu Madidi dans la perspective d’une alliance.
VII. CONCLUSIONS PRÉLIMINAIRES
Les élections mal préparées du 20 décembre 2023 ont laissé transparaître quelques réalités politiques inédites :
1. Un nombre très élevé de partis politiques (910) ;
2. Nombre très élevé des candidats :
- 26 à l’élection présidentielle ;
- 23 653 candidats ont été retenus, dont 17% de femmes aux législatives nationales ;
- 49.209 aux élections provinciales ;
3. 98 % de candidats transfuges du FCC et reconvertis en Union Sacrée s’abstiennent de mettre l’image du président Tshisekedi sur leurs supports de campagne ;
4. La quasi totalité des membres de la famille présidentielle sont candidats aux législatives ;
5. Des leaders connus et hautement placés ont été désillusionnés dans leurs fiefs respectifs. Cas du ministre de l’industrie Julien Paluku Kahongya, Modeste Bahati Lukwebo et Vital Kamerhe, tous proches de Félix Tshisekedi dont les derniers meetings ont été un fiasco à Goma et dans la Tshopo.
6. La CENI très contestée n’a eu que le pouvoir de Félix Tshisekedi comme défenseur.
Dans sa forme actuelle, la campagne électorale présidentielle en République Démocratique du Congo donne Moïse Katumbi Chapwe gagnant au scrutin du 20 décembre 2023 avec 62% de voix.
Le suivant, Félix Tshisekedi pourrait être en incapacité de remporter l’élection au regard de plusieurs faiblesses politiques accumulées tout au long de son mandat.
Cependant, cette conclusion est susceptible d’évoluer en fonction de deux réalités :
- au cas où Katumbi engrangerait de nouvelles adhésions politiques dans l’opposition, il améliorerait sa cote de popularité électorale en ramenant à la hausse son score à l’issue des scrutins ;
- au cas où des fissures au sein de l’Union Sacrée profitaient au candidat Katumbi, son score s’améliorerait de manière impressionnante.
Simaro Ngongo